JUIL 2025 | NO 07

MARKET INSIGHT – Juillet 2025

MARKET INSIGHT

L’analyse mensuelle de l’actualité économique et des marchés financiers mondiaux par Prime Partners.

Envers et contre tout

Alors que la situation géopolitique s’est considérablement dégradée durant le mois de Juin, Israël puis les Etats-Unis procédant à des frappes sur des sites nucléaires iraniens, le marché américain des actions a poursuivi son rebond sans coup férir. À l’inverse, les actions européennes ont marqué le pas, voyant ainsi se rapprocher en termes de performance 2025, leurs homologues américaines, pourtant largement en retard il y a encore trois mois, 

Pendant que l’indice S&P 500 termine le second trimestre de l’année à des niveaux historiques, il est intéressant de de remarquer que moins de dix pourcents des valeurs qui le composent sont à leur plus haut niveau de valorisation. Ce constat illustre ce qui était déjà le cas en mai, à savoir que le très fort rebond des dernières semaines est à mettre principalement sur le compte de quelques grandes sociétés technologiques, Nvidia et Microsoft en tête.

Les réactions des marchés financiers sont souvent déroutantes, du moins à court terme. La deuxième partie de juin en aura été une belle illustration, avec tout d’abord un enchainement logique d’évènements suite aux frappes israéliennes sur l’Iran, tirant le prix du pétrole vers le haut et amenant de l’incertitude aux investisseurs. La participation américaine aux bombardements a ensuite fait craindre un embrasement plus large au Moyen Orient, suscitant rapidement des anticipations d’un prix du baril en forte hausse. Il n’en a rien été. Mieux que cela, le marché a jugé la « réponse » iranienne aux frappes américaines bien timide et probablement synonyme d’une grande faiblesse militaire du pays. Les opérateurs ont alors vu les prix du brut reculer fortement, en dessous du niveau précédant les premières frappes israéliennes. Certains diront que le marché américain « fait l’autruche », comme le décrit la populaire expression française, et se montre extrêmement complaisant vis-à-vis de nombreuses réalités économiques et géopolitiques du moment. D’autres, au contraire, verront dans le comportement récent des actions américaines beaucoup de pragmatisme, reposant notamment sur la révolution de l’intelligence artificielle et la politique très libérale de l’administration Trump. Avant d’évoquer quelques-uns de ces éléments, il nous parait important d’informer nos lecteurs que l’expression « faire l’autruche » repose sur une croyance erronée, le grand oiseau n’enfouissant en réalité jamais sa tête dans le sol ou le sable en cas de danger…

Nul ne conteste aujourd’hui que nous assistons à une révolution technologique majeure, justifiant les immenses investissements effectués et les espoirs placés dans l’IA

Le rebond en « V » auquel nous venons d’assister ces deux derniers mois est, comme nous l’avons déjà mentionné, à mettre au crédit du secteur de la technologie américaine et de son poids très important dans l’indice S&P 500. Nul ne conteste aujourd’hui que nous assistons à une révolution technologique majeure, justifiant les immenses investissements effectués et les espoirs placés dans l’IA. Sur ce point à peu près tout le monde est d’accord.

À l’inverse, sur d’autres sujets, il est bien difficile d’établir un consensus. À commencer par la question de la dette américaine et du dollar. Le billet vert traverse une importante phase de dévalorisation et la désormais célèbre « Big Beautiful Bill » (BBB), si elle est adoptée, ne peut avoir comme conséquence qu’une dégradation de la trajectoire de la dette des Etats-Unis pour les années à venir. Dans ce sens, et comme nous l’avons déjà observé durant les derniers mois, la crédibilité à l’international des bons du Trésor américain pourrait en pâtir. Ces derniers étant une sorte de « collatéral » du système financier international, on ne peut qu’être très vigilant vis-à-vis de cette évolution.

Deuxième grand point d’interrogation, les tarifs et donc le visage du commerce mondial à venir. D’ici quelques jours le « délai » de trois mois accordé par le président Trump aux différents pays afin de négocier avec son administration prendra fin. À ce jour un seul vrai « deal » a officiellement été conclu avec le Royaume-Uni. La relation commerciale sino-américaine parait plus apaisée qu’en avril dernier, sans toutefois offrir à ce stade un cadre clairement fixé pour les échanges entre les deux plus grandes puissances mondiales. Les pays européens demeurent eux dans le flou pour l’instant, sans possibilité de jauger concrètement le stade où en sont les discussions menées entre les représentants du « vieux continent » et ceux du « nouveau monde ».

Troisième point d’incertitude et non des moindres, la FED et les taux d’intérêt. La relation entre Jérôme Powell et Donald Trump est loin de s’améliorer, le premier n’étant toujours pas pressé de procéder à l’importante baisse des taux réclamée par le second. Le président américain ne cache plus son opposition farouche au patron de la banque centrale, dont le départ officiel, programmé en mai 2026, pourrait être accéléré via l’éventuelle nomination d’un « shadow Fed Chair », ce qui serait une première dans l’histoire des Etats-Unis et, a priori, un développement venant altérer là encore la crédibilité et surtout l’indépendance de l’institution.

Deux des trois éléments cités plus haut devraient connaitre des développements imminents. La BBB suit en effet un ambitieux agenda avec pour objectif une validation formelle par les deux chambres d’ici au 4 juillet. Du côté des tarifs, la « trêve » de trois mois annoncée par D. Trump le 9 avril dernier prendra fin le 9 juillet. De quoi permettre aux investisseurs de jauger la situation globale sur ces deux fronts pour débuter le troisième trimestre de l’année et accueillir les premiers résultats d’entreprises du T2.

Du côté des économies de l’Union Européenne, l’issue des négociations tarifaires sera également déterminante pour savoir si l’Europe peut compter sur les échanges commerciaux internationaux pour tenter de redynamiser certains pans de son économie dont la phase de croissance molle perdure. La BCE devrait désormais faire une pause dans son processus de baisse des taux d’intérêt et l’inflation est en grande partie sous contrôle. Un dollar faible n’est évidemment pas une très bonne nouvelle pour les exportateurs européens qui, en plus de probables droits de douane, devront gérer un taux de change rendant leurs produits plus coûteux pour le consommateur américain.

Guère de nouveautés durant les dernières semaines en rapport avec l’économie chinoise, pour laquelle les mois se suivent et se ressemblent. Une crise générale semble avoir été évitée malgré la piètre situation immobilière, dont il parait désormais de bon goût de ne plus trop parler. Les derniers chiffres économiques ne sont de loin pas ceux d’un pays affichant un objectif de croissance de plus de cinq pourcents annuels mais il n’est pas non plus possible d’ignorer la puissance chinoise dans de très nombreux domaines, notamment la technologie. Les marchés en tiennent largement compte depuis le début de l’année, avec une performance des actions émergentes de plus de quinze pourcents, dont la Chine est le premier constituant en termes de capitalisation boursière.   

Les premières semaines de juillet devraient apporter plus de clarté aux opérateurs, tant sur le plan des échanges commerciaux à venir que sur la volonté de l’administration américaine de contrôler le déficit public des Etats-Unis durant les prochaines années

Notre scénario central demeure celui d’une économie américaine dont la croissance va être positive cette année. Les premières semaines de juillet devraient apporter plus de clarté aux opérateurs, tant sur le plan des échanges commerciaux à venir que sur la volonté de l’administration Trump de contrôler le déficit public des Etats-Unis durant les prochaines années. Ces deux points nous paraissent déterminants pour aborder la seconde partie de l’année en termes d’allocation d’actifs, notamment concernant le niveau d’’exposition aux actions. De plus, une amélioration de la visibilité liée aux tarifs permettra aux grands indicateurs macroéconomiques de retrouver de la stabilité, sans être fortement impactés par des mesures exceptionnelles liées aux droits de douanes ou à leur anticipation.

Nos allocations ont continué de profiter du rebond des marchés en juin. Nous détenons à travers de nombreux produits une exposition suffisante aux grande valeurs technologiques. À cela s’ajoutent les bons résultats obtenus sur les actions émergentes. Coté obligataire, les différents segments que nous privilégions ont également contribué positivement à la performance de nos mandats et permettent à nos allocations d’afficher une faible volatilité. Enfin, nous privilégions toujours l’or et le cash, dont les vertus, tant en termes de performance que de protection, font merveille en 2025.

À noter que nous sommes pleinement conscients de l’impact négatif de la faiblesse du dollar pour les mandats libellés en Euro ou en Franc Suisse.  Nous conseillons aux investisseurs de prendre soin de leur exposition nette en USD. La protection, en particulier en CHF, est certes coûteuse mais a fini par montrer son efficacité face à un dollar pour lequel nous avons de la peine à trouver des raisons d’être optimiste à moyen terme.

Plutôt que de choisir entre le verre à moitié vide ou à moitié plein, nous optons pour l’agilité dans nos portefeuilles. Un peu plus de visibilité à venir sur les fronts tarifaire et budgétaire pourrait faire basculer 2025 vers un bon cru pour les actions. Nos allocations en tiendraient alors compte. À l’inverse, il est trop tôt, à mi-année, pour écarter l’hypothèse d’un dérapage « incontrôlé » de l’administration Trump, dont le marché a jusqu’ici choisi de ne pas trop sanctionner les approximations et tâtonnements. À l’instar de l’autruche, nous ne comptons pas mettre la tête dans le sable face aux grands défis des semaines à venir.